RÉSUMÉ
Dans la présente étude, nous avons cherché à vérifier si les mandats sociaux et académiques prescrits par le curriculum scolaire exercent de fortes pressions qui orientent les attitudes des enseignants lors de l'identification d'un élève à des services spécialisés. Du même coup, nous avons voulu dégager l'ensemble des caractéristiques sociales et comportementales qui définissent la population des élèves référés aux services professionnels d'une commission scolaire. Les caractéristiques de deux groupes d'élèves du premier cycle du primaire, qui sont respectivement constitués de 107 élèves référés et de 157 élèves non-référés, ont été comparés.
Les élèves qui forment le groupe des référés fut identifié par les enseignants selon trois motifs de référence: pour troubles d'apprentissage, pour troubles de la conduite et du comportement et pour les deux difficultés à la fois. Les enseignants devaient nous indiquer pour chaque élève quelle était l'origine de la référence; l'élève est-il référé par les parents, par le directeur d'école ou l'enseignante, ou par une autre institution (services sociaux, services hospitaliers externes). L'échantillon des enfants non-référés a pour sa part été sélectionné dans quatre des neuf écoles qui ont participé à la recherche. Aux élèves des deux groupes, les enseignants ont remis une enveloppe contenant une fiche de renseignements personnels et un questionnaire nous permettant de mesurer le profil comportemental de l'enfant que leurs parents devaient dûment remplir. La fiche de renseignements nous informe sur le sexe de l'enfant, l'âge, le niveau scolaire, le statut et le niveau socio-économique de la famille. L'instrument servant à mesurer les comportements est le Child Behavioral Check List (CBFL) de Achenbach et Edelbrock (1983). Cet instrument nous permet de discriminer les comportements sur-réactifs et les comportements sous-réactifs, tels que définis par le Ministère de l'Éducation du Québec dans sa dernière définition des élèves en troubles de la conduite ou du comportement.
Les résultats démontrent que les élèves sont référés par les enseignants dans plus de 80% des cas et qu'ils sont majoritairement des garçons (67%). De plus, ils fréquentent, pour une bonne part, une classe de première année (60%) et ils sont généralement référés pour des troubles d'apprentissage (58%). En ce qui a trait à la famille, les résultats nous révèlent qu'il n'y a pas plus d'enfants référés qui proviennent d'une famille réorganisée (séparée/divorcée/reconstituée) que d'une famille intacte. Par ailleurs, en comparaison avec les élèves non-référés, ces élèves proviennent significativement (p<.05) de familles dont le revenu est modeste. Les échelles comportementales démontrent à leur tour que le groupe des élèves référés présentent significativement (p<.001) plus de comportements sur-réactifs que le groupe des non-référés. Ce résultat est expliqué par la tendance chez les enseignants à référer les élèves qui ne respectent pas leurs rôles d'instructeur et de gestionnaire de classe. On constate aussi que les élèves qui ont la particularité de présenter des comportements sous-réactifs "anormaux" sont très peu référés malgré l'importance de leurs difficultés. Ces enfants sont souvent ignorés par les enseignants car ils se conforment aux exigences du milieu scolaire.
1er novembre 2000