La parution à l'époque contemporaine, de ce quil est convenu d'appeler « oeuvres dystopiques » telles que Nous autres de Zamiatine, Le meilleur des mondes de Huxley, 1984 de Orwell et Farenheit 451 de Ray Bradbury nous amène à nous interroger sur les liens qu'elles ont avec l'utopie et l'idéologie.
Cette thèse soutient que la dystopie exprime des liens étroits entre certaines caractéristiques de l'utopie et de l'idéologie dans le contexte de l'imaginaire social. Ainsi, l'approche de Ricoeur concernant la problématique de l'idéologie et de l'utopie nous permet de comprendre comment ces deux phénomènes se retrouvent au coeur d'une tension sociale qui s'exerce dans ses rapports dialectiques entre ce qui est et ce qui devrait être entre des fonctions sociales d'intégration et de subversion. Dans ce contexte, cette recherche démontre que l'univers dystopique met en scène un univers social où la congruence entre ces deux fonctions sociales est presque irrémédiablement accomplie. En décrivant un univers cauchemardesque, les dystopistes ont cherché à caricaturer des tendances totalitaires qu'ils ont observées dans certaines idéologies contemporaines. La contestation dystopique est donc une critique voilée de certains grands idéaux de la civilisation occidentale tels l'égalité sociale, la rationalisation des conduites individuelles, le progrès techno-scientifique, qui ont pris naissance à la modernité. Par conséquent, la dystopie remet en question le point de vue des penseurs qui se sont inspirés de certains de ces idéaux dans l'élaboration de leur projet social.
2 août 2000